Philippe Lamour, 1903-1992 : un contemporain capital

Publié le par Michel Boissard

Philippe Lamour, 1903-1992 : un contemporain capital

 

 

 

« On le croyait sacré et embaumé, il meurt et l’on découvre combien il reste vivant. » Ces mots de Sartre, comment ne pas les dédier au souvenir de Philippe Lamour pour le centième anniversaire de sa naissance ? Sous la figure célébrée du père de l’aménagement du territoire, la biographie que lui consacre Jean-Robert Pitte révèle un personnage protéiforme, pétri des contradictions de son siècle, un esprit libre.

            A lui seul Philippe Lamour réunit les contrastes de notre géographie nationale. Natif de la plaine des Flandres, il achève son existence dans les fonctions de Président du Conseil économique et social du Languedoc-Roussillon. Entre-temps, il est Maire de la commune montagnarde de Ceillac, dans le Queyras. Philippe Lamour ou la diversité française. Avocat de métier il plaide, durant les années 30, dans les affaires Seznec et Stavisky. Avec son confrère du Barreau, le futur cinéaste André Cayatte, il écrit des romans gais. Enfin aux yeux du plus grand nombre, il est le paysan de Bellegarde. Se voulant à droite et à gauche, il est adepte de Lénine, Mussolini et Roosevelt. Il sera candidat radical-socialiste sous le Front Populaire. Puis il s’oppose à Vichy, tout en inclinant fortement vers le retour à la terre. En coquetterie avec De Gaulle, il demeure attaché à l’œuvre de Mendès-France. Philippe Lamour ou le non-conformisme.

            Mais comme le dit Pascal, c’est d’un point fixe qu’il faut juger les hommes et les choses. La traversée de siècle de Philippe Lamour s’arrime à deux ancrages forts. La revue Plans, un laboratoire d’idées dans la France des années tournantes d’après- 1914-18. Son leitmotiv : la planification pour l’économie, la société, la ville. L’équipe est prestigieuse : Giraudoux, Thomas Mann, Le Corbusier, Léger et Picart Le Doux … A la Libération, le laboratoire devient grandeur nature. C’est le Languedoc. Le Plan cesse d’être une utopie. Grâce à Jean Monnet, il est désormais une ardente obligation. L’aménagement régional en est la clé, à commencer par les campagnes et la maîtrise de l’eau. Le Bas-Rhône-Languedoc est l’aboutissement de ce grand-œuvre.

Concluant un ouvrage passionnant, J.R. Pitte en appelle à Giono et Edmond Rostand. Philippe Lamour fût une âme forte. Il avait du panache. Ce double qualificatif sied bien à celui qui demeure un contemporain capital.

 

 

           

Michel Boissard

 

Philippe Lamour, 1903-1992, Jean-Robert Pitte,  Fayard, 2002,  22  euros.

 

 

Publié dans articles La Gazette

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