REVOLTES, AVENTURIERS ET GRANDES GUEULES

La plume trempée dans de l’encre corrosive. Un sens du trait qui fait mouche. Un art consommé du portrait. La passion - sans modération - des livres et des écrivains.  C’est Raphaël Sorin (1942). Editeur depuis plus de trente ans. Ici, critique littéraire dont les chroniques réunies font un joli volume paru chez l’éditeur bordelais Finitude. Qu’on pourrait feuilleter à la façon de la fameuse « tirade des nez » de Cyrano de Bergerac. Aventurier : « Avec sa bande d’Apaches, il hante les restaurants ou se glisse par les égouts. Ses victimes, avant de mourir, hurlent son nom : Fantômas ! » Révolté. Le surréaliste Benjamin Péret (1899-1959) qui « déjante les roues de la sagesse populaire et triomphe des conventions ». A coup de proverbes sulfureux : « Un albinos ne fait pas le beau temps. – « Qui couche avec le Pape doit avoir de longs pieds. » Cosmopolite. Vladimir Pozner (1905-1992) le romancier du Mors aux dents (1937). Où cette figure originelle du futurisme russe galope  « de la Volga au Pacifique, de Canton à l’Océan Glacial, tandis que les soldats de Gengis Khan dorment dans les plaines de Hongrie et de Russie. » Provocateurs : les grands du polar… Robert Bloch (1917-1994), l ’américain qui joue « L’Eventreur » (1954). Le montpelliérain Léo Malet (1909-1996) qui crée Nestor Burma. Tous deux, visitant les caves de la Veuve Cliquot à Reims ! Pour ne pas conclure : Grandes Gueules. Telle Arletty (1898-1992) ! «Atmosphère…est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? » Née à Courbevoie. Comme cet autre « gueulard » des lettres françaises : Louis-Ferdinand Céline (1894-1961). « Un poète, un grand poète, le poète du siècle (…) C’est encore mieux que du Baudelaire quand il parle de l’acteur Le Vigan dans Normance… »

                                                                                                 Michel Boissard

Les Terribles, R.Sorin, Finitude, 2011, 16 euros